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Suivre les émissions de CO2 de pays individuels pour l'Accord de Paris

2023-03-09

Adapté du communiqué de presse de la NASA

Un satellite d'observation de la Terre de la NASA a aidé des chercheurs à suivre les émissions (sources) de dioxyde de carbone (CO2) dans plus de 100 pays à travers le monde. Ce projet pilote offre un nouveau regard puissant sur le CO2 émis et retiré (puits) de l'atmosphère par les forêts et autres puits de carbone à l'intérieur des frontières nationales. Les résultats montrent comment les outils spatiaux peuvent aider à mieux comprendre la situation sur Terre, alors que les nations s'efforcent d'atteindre leurs objectifs en matière de climat.

Nous avons un gros problème à résoudre, et l'Accord de Paris vise justement à y parvenir en fixant des objectifs de réduction des émissions de CO2. Mais il y a un autre problème : comment suivre l'évolution des émissions de CO2 dans toutes les facettes de l'économie d'un pays ?

Dans le cadre de l'Accord de Paris, chaque pays est responsable de la surveillance et de la déclaration des émissions et des absorptions de gaz à effet de serre à l'intérieur de ses frontières, en fonction de secteurs. Ces données sont appelées « Inventaires nationaux des gaz à effet de serre » et sont compilés et soumis chaque année par les pays à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques. Cette approche ascendante pose toutefois quelques problèmes :

  1. Plus de 50 pays n'ont pas déclaré leurs émissions depuis 10 ans, ce qui entraîne des lacunes dans les données.
  2. Les estimations ascendantes des émissions et absorptions de CO2 reposent sur des données d'activité précises et actualisées et sur des modèles qui établissent un lien entre ces données d'activité et les émissions ou absorptions nettes. Ces approches peuvent présenter des incertitudes considérables lorsque les données d'activité sont en retard ou ne sont pas entièrement connues.
  3. Il est difficile pour les pays de vérifier l'exactitude des inventaires agrégés aux totaux nationaux.

En outre, les inventaires nationaux ne comprennent pas les émissions et les absorptions de CO2 par les écosystèmes non gérés (y compris certaines parties des forêts tropicales et boréales) ou par les océans. Il est important de les quantifier pour les raisons suivantes :

  1. La concentration n'est pas égale à l'émission, car lorsque le CO2 est émis dans l'atmosphère par des sources humaines et naturelles, il est également éliminé de l'atmosphère par les océans, les lacs, les plantes, etc. L'émission nette doit être dérivée des données relatives à la concentration, et l'établissement de ces inventaires de CO2 nécessite des efforts et une expertise considérables.
  2. Les écosystèmes non gérés tels que les océans, les forêts tropicales ou les sites isolés sont difficiles à surveiller et ne sont pas bien pris en compte, ce qui entraîne d'importantes lacunes dans les données relatives au bilan mondial du CO2.

Si nous voulons avoir une chance de limiter les conséquences du changement climatique en maintenant le réchauffement de la planète en dessous de 1,5 °C, voire de 2 °C, il est absolument essentiel d'avoir une connaissance précise du bilan de CO2.

Combler les lacunes avec l'approche descendante

C'est là qu'interviennent les données satellitaires et au sol de CO2 atmosphérique. Les émissions et absorptions nettes de CO2 déduites de ces données sont non seulement cruciales pour la validation des méthodes ascendantes, mais elles garantissent également une couverture globale des parties les plus éloignées du globe.

Les scientifiques de l’Institut royal d’Aéronomie Spatiale de Belgique (IASB) ont fourni des données provenant d'une station terrestre située sur l'île de la Réunion pour une étude internationale, menée par plus de 60 chercheurs du monde entier, qui a utilisé des mesures satellitaires effectuées par la mission Orbiting Carbon Observatory (OCO)-2 de la NASA et un réseau mondial de sites de surface pour quantifier les changements dans les concentrations de CO2 dans l'atmosphère de 2015 à 2020. Ils ont ensuite été en mesure de déduire les émissions et les absorptions nettes de CO2 à l'origine de ces changements, en utilisant une approche descendante.

Jusqu'à présent, l'étude montre que les données sur le CO2 atmosphérique peuvent saisir les émissions et les absorptions pour les grands pays extratropicaux (par exemple, les États-Unis, la Russie, la Chine), mais qu'elles restent difficiles pour les pays de taille moyenne (par exemple, la Turquie), en particulier pour les régions où la couverture des données locales est faible (telles que les tropiques).

Il faut que cela change, et vite, car 2023 marque le premier « Bilan mondial », un processus qui vise à évaluer les progrès collectifs du monde vers la limitation du réchauffement climatique spécifiée dans l'Accord de Paris, à intervalles réguliers de cinq ans. Cela signifie que le prochain bilan mondial est prévu pour 2028. D'ici là, l'Europe entend avoir lancé et collecté les données de sa première mission spatiale dédiée au CO2 - CO2M. L'élargissement de la couverture de mesure de CO2M nous permettra de combler les lacunes en matière de données et de mieux estimer les émissions et les absorptions pour les petits pays. Des extensions complémentaires des mesures de CO2 locales, au sol et par avion dans les régions sous-échantillonnées sont également nécessaires pour combler les lacunes d'observation critiques dans les régions, telles que les tropiques, où les nuages obstruent souvent les observations spatiales.

Porto Velho Station
Station TCCON à Porto Velho (Brésil)
Crédit: Filip Desmet (IASB)

Contribution de l’IASB sur les « données de fond » et le comblement des lacunes en matière d'observation locales dans les régions critiques

Le site de l'île de la Réunion, qui a fourni des données pour la présente étude, héberge des instruments effectuant des mesures de la colonne totale et des concentrations de surface in-situ de gaz à effet de serre exploités par l’IASB en collaboration avec des partenaires locaux (LACy et OSU-R) et le LSCE (France). Les mesures in situ font partie du système européen ICOS (Integrated Carbon Observation System) et les mesures de la colonne totale font partie des réseaux mondiaux TCCON (Total Carbon Column Observing Network) et NDACC (Network for the Detection of Atmospheric Composition Change). Le mois dernier, l’IASB a installé des nouveau instruments TCCON et NDACC à Porto Velho (forêt amazonienne au Brésil) en collaboration avec l'IFRO et l'INPE. Il s'agit actuellement de la seule station TCCON sur le continent sud-américain et elle fournira des données essentielles provenant d'une région sous-échantillonnée, contribuant aux études sur le cycle du carbone, à la validation des satellites et des modèles et aux futurs bilans mondiaux.

Les stations de l’IASB collectant ce type de données sur les concentrations de gaz à effet de serre dans les colonnes pour les études futures seront situées à :

  • Ile de la Réunion (démarrage en 2011 - , long terme)
  • Porto Velho, Brésil (démarrage en février 2023 - , long terme)
  • Kolkata, Inde (démarrage en janvier 2023 - , campagne)
  • Belgique (prévu en 2023)
  • République démocratique du Congo (prévue en 2024 - , en campagne)

Ces stations contribueront au système de surveillance et de vérification du CO2 (CO2SMVS) de Copernicus, les efforts de l'Europe pour garder un œil sur le budget mondial du CO2 grâce à un réseau de stations terrestres, de satellites et de modélisation atmosphérique.

Espérons que les données scientifiques que nos chercheurs s'efforcent de rassembler aideront les décideurs politiques à maintenir le monde sur la bonne voie pour atteindre nos objectifs en matière de climat.

Suntracker at Kolkata Station India
Capteur solaire de la station à Kolkata (Inde).
Crédit: Mahesh Kumar Sha (IASB)

 

Contact

Lucie Lamort
Communication
lucie (dot) lamort (at) aeronomie (dot) be

Karolien Lefever
Chef du département Communication et documentation
karolien (dot) lefever (at) aeronomie (dot) be

 

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Visualisation d’émissions et stockage nettes moyennes de dioxyde de carbone, par pays et par année entre 2015 et 2020.
Crédit : Helen-Nicole Kostis et Greg Shirah (NASA's Scientific Visualization Studio)
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Visualisation des émissions de combustibles fossiles par pays et par année entre 2015 et 2020.
Crédit: Helen-Nicole Kostis et Greg Shirah (NASA's Scientific Visualization Studio)
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Visualisation de la variation des stocks de carbone terrestre par pays et par année entre 2015 et 2020.
Crédit: Helen-Nicole Kostis et Greg Shirah (NASA's Scientific Visualization Studio)